Marie Gaulis
Le Royaume des oiseaux
Editions Zoé, 2016
Dans un château délabré, l’histoire des aïeux de l’auteure, à laquelle se mêlent des éclats de ses propres souvenirs. Entre les morts et les vivants, les femmes cherchant le sens et les hommes en quête d’un art de vivre, et au rythme d’une écriture précise et légère, le lecteur finit par entrapercevoir ce que chacun doit aux anciens, qui sont désormais brume au royaume des oiseaux.
Aus: Marie Gaulis. Le Royaume des oiseaux. Editions Zoé, 2016
Je ne peux rien comprendre à cette nouvelle topographie de ronds-points, de ponts, de garages, d’entrepôts vendant je ne sais quelles marchandises, mais je reste proche des clochers, de la chapelle Saint François de Sales où j’allais à la messe, de ma petite chapelle à moi, celle de mon époux, celle où ce qu’il reste de mon corps est enterré en une compagnie confuse, dans l’obscurité humide d’où je me suis échappée pour me poster ici, dans l’air vibrant d’oiseaux et de vent.
Fr, 06.05.16, 11:30
Sa, 07.05.16, 19:00
Ligne Imaginaire
Editions Métropolis, 1999
Aus: Marie Gaulis. Ligne Imaginaire. Editions Métropolis, 1999
Dans l’enfilade des pièces et des jours, on se tient.
Dans la pièce qu’on vient de repeindre en jaune, on s’assied, on lit le vide des journaux. On attend celui qu’on aime.
Dans le son inepte de chansons qui ne laissent pas de traces, on écoute battre son pouls. On pense à tout ce qu’on aimerait faire – beaucoup d’idées, d’histoires, d’images qui vont et viennent en un flux léger et silencieux comme celui du sang.
On se tient dans l’enfilade des jours, dans l’encadrement de l’été – on le voudrait plus lent, englué dans une chaleur qu’il a parcimonieuse, on le voudrait immobilisé dans le monotone crissement des grillons et le chant fou des martinets.
Dans la pièce jaune épi, jaune Mexique, jaune Prassinos, je suis assise, heureuse, les jambes croisées sur le secret passage du sang, les yeux posés sur la montagne bleue, le bleu de l’hiver contre le jaune de l’été.
Le bleu et le jaune du temps arrêté, dans la chambre qu’on vient de repeindre, encore vide de meubles, et toute pleine de mes rêveries.