Antonin Moeri

Antonin Moeri, né à Berne en 1953, a vécu à Mexico, Zurich, Vevey, Paris, entre autres. Comédien de formation, il a publié 11 livres – nouvelles, récits, romans, théâtre – ainsi que diverses traductions de Ludwig Hohl et Robert Walser. Lauréat du Prix Schiller 1994. (2016)
Werke (Auswahl)
Pap's.
Bernard Campiche Editeur, 2015
Encore chéri.
Bernard Campiche Editeur, 2013
Le sourire de Mickey .
Bernard Campiche Editeur, 2003
Paradise Now.
Bernard Campiche Editeur, 2000
Allegro amoroso.
L'Age d'homme, 1993
Pap's
Bernard Campiche Editeur, 2015
Le père du narrateur, grand cardiologue, remet à son fils une valise bourrée de cahiers annotés au fil du temps. Quinze ans après sa mort, le fils découvre dans les écrits paternels une vie pleine de passions, de doutes, d’élans et de regrets. Le livre s’égrène comme un morceau joué à quatre mains, où les accords composés par le fils soutiennent la mélodie paternelle et lui confèrent son harmonie.
Aus: Antonin Moeri. Pap's. Bernard Campiche Editeur, 2015
Après avoir étendu sur les galets tièdes un grand linge de bain puis enlevé nos vêtements, nous nous asseyons et, les genoux dans les bras, fixons les montagnes en face, les maisons du village qu’on distingue, de l’autre côté du lac, au pied de ces montagnes dont il n’y a rien à dire. Je me rappelle ce moment de recueillement dans un paysage magnifique, où il suffit de regarder le monde pour se sentir exister, où la moindre parole serait de trop.
Fr, 06.05.16, 14:00
Sa, 07.05.16, 12:00
Sa, 07.05.16, 18:00
Le sourire de Mickey
Bernard Campiche Editeur, 2003
Aus: Antonin Moeri. Le sourire de Mickey . Bernard Campiche Editeur, 2003
Ce jour-là, autour de la soupe à la courge, Jimmy sombra dans un trou noir. Il fut traversé par des forces qui le dépassaient. Il m’est difficile de décrire avec exactitude le phénomène... Essayons tout de même... Ce que je pourrais dire sans trop me tromper, c’est que la sensation d’asphyxie ressambleit à une noyade. Le corps en désordre est pris dans un hallier d’écume, mélange de montagne et de cauchemar. Les nerfs crient dans la nuque. Les gouttes de sueur perlent sur le front et les bras. D’une voix brisée, Jimmy vociféra en surmontant son bégaiement: «Je veux qu’il mange sa soupe, nom de dieu, je veux des enfants en bonne santé, capables de se défendre dans un monde de chantage et de bluff...» On connaissait ses colères froides, ses rages rentrées, ses rares dérapages verbaux. Mais là, l’homme semblait prendre un chemin plus dangereux. Il tendit les bras pour se saisir de la soupière qu’il écrasa violemment sur la table. Les jets de soupe firent sur le bois comme un tableau de Pollock.
Les enfants s’étaient réfugiés dans leur chambre, terrifiés. La femme de Jimmy se dressait devant son mari, exigeant des explications. Il était incapable d’en donner. Il la repoussa parce qu’il voulait également se réfugier dans sa chambre. En réalité, son idée était d’avaler un tranquillisant. Son épouse résistait. «Laisse-moi passer, j’étouffe, je n’en peux plus!» Il la poussa cette fois avec une telle force qu’elle alla s’écraser contre une paroi.