Françoise Matthey
Extrait de: Pâques dans les couleurs de vivre
D’abord, ça a été facile de marcher, des poèmes pleins les yeux jusqu’au rouge cendreux du soir. Pour en finir avec le jour. Mais sous le poids des ondes et du soufre, la mort dessinait son emblème dans un ciel noir, simplement noir. Depuis longtemps, les lumières électriques des villes avaient éteint les constellations des étoiles, la voie lactée. Les comètes voyageaient, doulou-reuses, à travers des ceintures de poussière.
Va, m’entendais-je répéter en marchant, va, et j’avançais hébétée, le regard fixé sur les ondulations d’un horizon gercé de fièvres. J’ignorais à qui je m’adressais. Va, m‘entendais-je dire sans cesse.
Parfois je passais à côté de chantiers fermés aux regards par de hautes palissades. J’entendais des enfants jouer à de sévères jeux sur le béton des sols. Aucun vent ne dérangeait plus ni la poussière des rues ni les pollens accumulés dans les coins des fenêtres. Le monde en apnée s’inclinait.
Un autre pays, avait-il dit, un goût de sable...
Comment ces simples mots auraient-ils pu couvrir les cercles mauves sur mon oreiller?
Une traversée, avait-il encore ajouté.
Je l’avais alors trouvé pâle, et sa main amaigrie qui tenait en tremblant une Camel.